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Le début de ce billet a été publié hier en japonais afin d'attirer l'attention sur ce nouveau délire qui a saisi notre municipalité.

Depuis quelques mois nous sommes en effet abreuvés à Quiberon de rocambolesques et merveilleuses histoires de poissons.  Poisson vivant d’un côté, mort douce de l’autre, difficile de se faire une opinion sur la réalité de ces belles histoires qui nous sont racontées et sur le potentiel économique réel de celles-ci.

Le merlan de ligne ainsi euthanasié serait vendu 6.50 € le kilo au lieu de 5.30 € au motif que la technique japonaise de l’Ikijime, vidant le poisson de 80% de son sang, préserverait la qualité gustative des chairs de celui-ci.

Les bobos vous expliqueront aussi que cette technique abrège la souffrance du poisson et qu’à tout prendre, si on l’accompagne de petits légumes gentiment arrachés de leur terre nourricière et accompagnés de multiples câlins lorsqu’on qu’on les pèle ou les cisèle, cela vaut mieux que ce poisson de chalut qui vous regarde dans la poêle avec ses yeux de merlan frits alors que vous le torturez.

S’agissant du poisson vivant, la municipalité se glorifie de la progression certes importante (450 kg en 2015, 1,7 tonnes en 2016, et 3,3 tonnes en 2017) de cette activité nouvelle pour la criée de Quiberon, alors qu’elle n’y est pour rien puisque cette activité repose, comme la précédente sur une initiative individuelle, toutes deux restant encore tout à fait marginales.

Une grande bataille s’annonce ainsi entre merlans à Quiberon, merlans mort doucement d’un côté, merlans vivants de l’autre, sans parler de tous ces autres merlans très inquiets du vieillissement de la population quiberonnaise et de la perte de potentiel capillaire cultivable qu’ils subissent de ce fait. Faudra-t-il prévoir  pour ces derniers une subvention de soutien suite à l’ouverture de la résidence seniors ?

Mais bien sûr, « Ikijime » et « poisson vivant » c‘est chic, c’est tendance, c’est porteur d’image, tout ce que ne cesse de rechercher notre Maire, pape, comme chacun le sait du marketing sardinier.

Le contribuable quiberonnais sera donc ainsi, comme à chaque fois, appelé à soutenir de ses deniers des investissements qui devraient rester d’ordre privé.

La progression de la criée vient d’abord de ce qu’elle est sortie depuis 2015, avec son changement de direction, d’habitudes routinières et peu productives comme d’une organisation commerciale traditionnelle devenue obsolète. D’un peu moins de 1 100 T en 2015 à 1 400 T en 2017 la progression est ainsi très significative mais ne saurait se justifier par ces seules nouveautés mises en avant par la municipalité dans sa communication tant la part de celles-ci reste  extrêmement minoritaire dans le tonnage débarqué à Quiberon.

A côté de son imposant voisin Lorient, première criée française en 2016 tant en tonnage qu’en chiffre d’affaires, Quiberon ne se classe qu’en 28ème position des ports de pêche et en 29ème position des criées françaises s’agissant des tonnages traités.

Pour ce qui concerne la part du tonnage débarqué vendu en criée, elle n’aurait été que de 76,5% en 2016 ce qui laisserait encore une marge de progression commerciale à la criée de Quiberon hors l’évolution propre des apports de la pêche côtière et sa diversité.

Cette diversité des apports entre ports d’une part, mais également entre saisons de pêche, rend assez discutable cet autre discours fondé sur la marotte « haut de gamme » de Mr le Maire tant elle rend difficile toute véritable comparaison entre ports. Certes il y a d’évidence de très grosses différences de prix au kg débarqué entre ports, entre pêche artisanale et pêche industrielle notamment, mais les différences entre ports de pêche artisanale par exemple tiennent sans doute plus à la composition des apports en criée qu’à la performance commerciale de celle-ci.

La moyenne des prix en criée aurait été en 2016 de 4,16 €/kg et la médiane de 4.01 € au plan national alors qu’à Quiberon le prix moyen constaté aurait été de 4.24 €/kg ; il n’y a donc pas encore de raison de s’ébahir des performances de la criée de Quiberon et d’une montée en gamme qui reste à démontrer.

Si l’on ne considère que les 16 criées ayant traité moins de 3 000 tonnes en 2016, Quiberon n’est ainsi que la 10éme des petites criées en tonnage et que la 11éme en termes de prix/kg. Elle se situe très loin donc de Royan, Yeu, Le Croisic, Noirmoutier ou Arcachon  (toutes ces villes que se plait à nous donner en exemple Mr le Maire) où les apports sont semble-t-il valorisés à un cours moyen 1,6 à 1,7 fois supérieur, le cas de Royan n’étant pas même considéré (px/kg 2,3 fois supérieur à celui de Quiberon).

Le nouveau directeur a sans aucun doute remis la criée de Quiberon dans le bon chemin, la hausse du carburant a incité les armateurs à débarquer leur poisson au plus près du lieu de pêche, c’est déjà pas mal.

Les cocoricos municipaux sont, eux, pour l’instant de trop.

Une fois encore, la communication prend le pas, à Quiberon, sur la réalité.

 

Jo le Tacaud

 

PS :

Pour reprendre cet exemple du merlan de ligne euthanasié à la japonaise, l’écart de prix de 22 % (6.50 € le kilo au lieu 5.30 €) cité par le jeune ligneur concerné (source http://pdm-seafoodmag.com/lactualite/detail/items/likijime-made-in-quiberon.html), semble bien faible par référence à l’écart de prix de 1 à 3 entre prix au kg/du merlan débarqué et prix du filet levé sortie d'usine (source http://www.lemarin.fr ). Le temps mis par lui à tuer ses poissons vaudrait ainsi infiniment moins que celui qu'il passerait à lever leurs filets. N'y aurait-il pas là une autre piste pour lui de valoriser sa pêche et son métier ?

 

#quiberon    @Jo_Le_Tacaud

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